Le terme jhāna signifie forte concentration. Il est apparenté au verbe pali jhāyati, qui signifie brûler avec une flamme stable. En pali, il existe de nombreux mots pour « brûler », mais le mot jhāyati est habituellement utilisé pour la flamme stable d’une lampe à huile, dont la lumière est suffisamment stable pour qu’on puisse lire près d’elle, et pour pouvoir remplir entièrement une pièce…
Quand il est appliqué à l’esprit, ce type de «combustion» signifie être focalisé de façon stable et claire sur un endroit, mais en même temps être pleinement conscient du corps tout entier.
Les jhāna comportent quatre niveaux. Nous sommes en train de travailler sur le premier niveau, qui comprend cinq facteurs. Trois de ces facteurs sont des causes, et deux sont des résultats. Les causes sont l’évaluation, la pensée dirigée, et l’unification de l’esprit. Vous dirigez vos pensées vers la respiration, et à chaque fois que votre conscience s’écarte de la respiration, vous la ramenez à elle. Cela, c’est la pensée dirigée. Quand vous pouvez rester focalisé de façon stable sur la respiration de cette manière, cela devient l’unification de l’esprit. L’évaluation signifie que lorsque vous vous focalisez sur la respiration, vous évaluez si cela se passe bien. Est-elle trop longue ou trop courte ? Trop rapide ou trop lente ? Trop légère ou trop lourde ? Ensuite, vous essayez d’ajuster la respiration pour que cela convienne. Et ensuite, vous remarquez comment respirer d’une manière qui donne naissance à un sens d’aise, de bien-être, et de ravissement. Le sens de bien-être est l’un des facteurs de type résultat. L’autre facteur est le ravissement. Le mot pour aise et bien-être – sukha – peut aussi signifier plaisir. Le mot pour ravissement – pīti – signifie aussi rafraîchissement et un sens de plénitude.
Quand tous ces facteurs sont rassemblés, c’est le premier jhāna…
Quand la manière dont vous respirez peut donner naissance à un sens d’aise et de plénitude, vous le laissez se répandre à travers tout le corps. Le processus de travailler cette aise à travers le corps constitue aussi un aspect de l’évaluation. Dans le Canon, l’image de cet aspect de l’évaluation est celle d’un assistant aux bains qui pétrit ensemble de la poudre de bain et de l’eau. En Inde, à l’époque du Bouddha, les assistants aux bains n’avaient pas de savon. Ils avaient une sorte de poudre de bain qu’ils mélangeaient avec de l’eau, de la même manière qu’un cuisinier mélange de l’eau avec de la farine pour faire de la pâte, et ensuite la personne qui prenait un bain frottait ce mélange sur son corps. Le Bouddha a dit que tout comme vous pétririez ce mélange, de la même manière, vous pétrissez ce sens de plaisir et de ravissement à travers le corps. Ensuite, lorsque vous développez ce sens de respiration calmante qui remplit le corps tout entier, cela devient un autre aspect de l’unification de l’esprit : votre corps tout entier est rempli par la sensation de la respiration, et cette sensation unique remplit votre conscience. C’est ce que nous avons fait ensemble. Ainsi vous avez travaillé sur les jhāna sans le savoir. Une des raisons pour lesquelles je n’ai pas encore mentionné les jhāna, c’est parce qu’on entend souvent dire que les jhāna sont quelque chose de dangereux, et que je ne voulais pas que vous ayez peur de ce que nous sommes en train de faire.
En fait, le Bouddha a dit que le plaisir des jhāna est la forme de plaisir la plus sûre que vous pouvez obtenir à travers le processus de la fabrication : corporel, verbal, et mental. Quand l’esprit est ainsi stable et ferme, avec un sens d’aise, de plaisir et de rafraîchissement, il est beaucoup moins tenté d’aller rechercher des plaisirs malhabiles. Les dangers de cette sorte de concentration sont peu nombreux. Parfois, les gens deviennent paresseux s’ils développent une addiction envers elle. Parfois, ils l’utilisent comme un moyen pour fuir les problèmes de la vie. Mais ces dangers sont mineurs, en particulier quand on les compare aux dangers des plaisirs sensuels. Sous l’influence du désir sensuel, des gens peuvent tuer et voler. Mais personne n’a jamais tué ou volé à cause des jhāna.
Nous travaillons donc sur un plaisir qui fournit un fondement d’aise et de bien-être que nous pouvons maintenir à l’intérieur de nous-mêmes, cela permet d’être beaucoup moins tentés d’aller à la recherche des plaisirs sensuels. Cela nous fournit aussi l’occasion d’obtenir des visions pénétrantes dans l’esprit, en particulier un sens de la force de la perception, parce que les jhāna nous amènent à observer comment notre perception de la respiration exerce une influence énorme sur la façon dont l’esprit peut facilement se concentrer.
Par exemple, afin de respirer d’une manière qui donne naissance à un sens de plénitude, vous devez vous assurer que lorsque vous expirez, vous ne comprimez pas l’énergie respiratoire. Souvent, quand les gens expirent, ils perçoivent inconsciemment qu’ils doivent exercer une pression sur l’énergie qui sort, de la même manière que vous appuyez sur un tube de dentifrice pour en faire sortir la pâte. Donc, essayez de percevoir le processus respiratoire d’une manière qui vous permet de maintenir un sens de plénitude dans vos nerfs et vos vaisseaux sanguins, même lorsque vous expirez. Une autre manière dont vous pouvez voir la force de la perception, c’est si votre image mentale du corps qui inspire et qui expire est comme celle d’un soufflet! Cela donne un sens de rugosité au souffle, car il doit être forcé à travers le nez. Mais si vous percevez le corps comme une éponge, et que le souffle peut entrer et ressortir à travers chaque pore de votre peau sans qu’il y ait besoin de le forcer, alors le sens d’énergie dans le corps devient beaucoup plus raffiné, et constitue un endroit beaucoup plus agréable pour que l’esprit y demeure.
Méditation guidée
Donc, avec ces pensées à l’esprit, refaisons encore une fois une méditation guidée. Trouvez une manière de respirer qui vous convient en ce moment même. Commencez avec quelques respirations bien longues et bien profondes. Si vous vous sentez bien, continuez. Si ce n’est pas confortable, remarquez quelles sont les parties du corps qui se tendent lorsque la respiration s’allonge. Essayez de détendre ces parties du corps, tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Si cela continue à ne pas être agréable, alors vous pouvez changer le rythme de la respiration. Remarquez si le corps a besoin de plus d’énergie ou a besoin d’être calmé. Trouvez un sens d’équilibre dans la manière dont vous respirez. Si vous trouvez qu’il y a un sens de tension quelconque dans la peau, où que cela soit dans le corps, alors laissez-le se détendre. Cela permet à l’énergie respiratoire de s’écouler plus facilement quand elle entre et ressort à travers les pores. Quand vous trouvez un rythme de respiration qui vous convient, essayez de l’examiner plus en détail pour voir comment est le ressenti dans différentes sections du corps. Commencez avec le nombril. Observez cette partie du corps lorsque vous inspirez et que vous expirez, et voyez si vous devez ajuster la respiration d’une manière ou d’une autre afin que le ressenti soit particulièrement bon à cet endroit. Ensuite, laissez cette énergie respiratoire se répandre, non seulement autour du nombril, mais aussi vers le côté inférieur droit et le côté inférieur gauche de l’abdomen. Si vous remarquez un schéma de tension ou de serrement quelconque dans ces parties du corps, laissez-les se dissoudre, tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Maintenant, déplacez votre attention vers le plexus solaire et suivez les mêmes étapes à cet endroit. En d’autres termes, trouvez un rythme de respiration qui convient particulièrement bien à cette partie du corps, et ensuite laissez ce sens d’aise et de bien-être se répandre de chaque côté du plexus solaire, vers le flanc droit et le flanc gauche. Si vous trouvez un sens de tension ou de serrement quelconque dans ces parties du corps, laissez-le se détendre tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Maintenant, amenez votre attention au milieu de la poitrine et suivez les mêmes étapes à cet endroit. En particulier, quand vous vous focalisez sur la poitrine, essayez de respirer d’une manière qui est particulièrement rafraîchissante dans la région du cœur. Maintenant, amenez votre attention à la base de la gorge et suivez les mêmes étapes à cet endroit. Maintenant, amenez votre attention au milieu de la tête. Pensez que l’énergie respiratoire entre et ressort non seulement à travers le nez, mais aussi à travers les yeux et les oreilles, qu’elle entre depuis l’arrière de la tête, qu’elle descend depuis le sommet de la tête, qu’elle passe doucement à travers tout schéma de tension que vous pouvez avoir dans la tête. Maintenant, amenez votre attention à la nuque. Lorsque vous inspirez, pensez que l’énergie respiratoire entre dans le corps à cet endroit, qu’elle descend ensuite par les épaules et les bras et qu’elle ressort par le bout des doigts. Quand vous expirez, pensez que l’énergie sort de ces parties du corps en rayonnant dans l’air. Lorsque vous vous sensibilisez à ces parties du corps, essayez de remarquer quel est le côté qui a le plus de tension : les épaules, la partie supérieure des bras, la partie inférieure des bras, les poignets, les mains, même les doigts. Quel que soit le côté qui semble avoir le plus de tension, relâchez consciemment ce côté-là, tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Conservez votre attention à la nuque. Cette fois-ci, lorsque vous inspirez, pensez que l’énergie respiratoire entre à cet endroit et qu’ensuite elle descend de chaque côté de la colonne vertébrale, jusqu’au coccyx. Lorsque vous expirez, pensez que l’énergie sort de cette partie du corps en rayonnant dans l’air. Et encore une fois, essayez de remarquer quel est le côté qui a le plus de tension : la partie supérieure du dos, la partie inférieure du dos, et la région autour du coccyx. Détendez consciemment ce côté tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Maintenant, focalisez votre attention sur le coccyx. Lorsque vous inspirez, pensez que l’énergie respiratoire pénètre à cet endroit, qu’ensuite elle passe à travers les hanches, les jambes, jusqu’à la pointe des orteils. Lorsque vous expirez, pensez que l’énergie respiratoire sort en rayonnant dans l’air. Et encore une fois, remarquez quel est le côté du corps qui a le plus de tension dans chaque partie : dans les hanches, dans les cuisses, dans les mollets, dans les chevilles, et dans les pieds. Quel que soit le côté qui a le plus de tension, laissez ce côté se détendre, et conservez-le détendu tout au long de l’inspiration, tout au long de l’expiration. Cela complète un cycle de l’examen du corps. Vous pouvez recommencer et essayer de remarquer s’il y a des schémas de tension que vous avez peut-être ratés la première fois, par exemple au revers des mains, sur les pieds, autour du bassin. Passez à travers le corps autant de fois que vous en avez envie. Ensuite, quand vous êtes prêt à vous établir, choisissez un endroit qui semble agréable, où la respiration est particulièrement rafraîchissante, ou l’endroit où c’est le plus facile pour vous de maintenir votre focalisation. Laissez votre attention s’établir à cet endroit, et ensuite se répandre à travers tout le corps. Lorsque vous répandez votre conscience, souvenez-vous de ne pas répandre de la pression ou de la tension à travers le corps. Soyez simplement conscient tout autour de vous. Pensez que le corps entier inspire, expire, comme une éponge saturée d’eau. Et ensuite, essayez simplement de maintenir cette conscience centrée mais vaste.
C’est tout ce que vous avez à faire. Il n’y a pas d’autre endroit où vous devez aller, rien d’autre dont vous soyez responsable en ce moment. Essayez simplement de maintenir cette conscience centrée mais vaste. Laissez la respiration être aussi confortable et aussi naturelle que possible. Si la respiration devient très raffinée, faites particulièrement attention à maintenir l’étendue de votre conscience. Même si l’inspiration et l’expiration semblent disparaître, vous avez toujours votre fondement avec cette conscience vaste du corps dans son entier
… ce sont là les éléments de base pour pratiquer les jhāna.
Quand vous sentez que le ressenti de la respiration est très bon, vous pouvez abandonner l’évaluation et rester simplement avec le plein sens de la respiration. Laissez votre conscience devenir une avec la respiration.
C’est tout ce que vous avez à faire. Cet état d’esprit est bon pour le corps, bon pour l’esprit, et fournit un bon fondement pour l’apparition de la vision pénétrante. Donc, assurez-vous que ce fondement est fort. Construisez-le avec soin. Ne soyez pas trop pressé de construire cinq ou six étages au-dessus. Focalisez-vous sur le fondement, et tout le reste ira bien.
Question : comment pratique-t-on les jhāna ? Quelle est leur utilité ? Réponse : il vous faut pratiquer les jhāna de la même manière que celle que nous utilisons : apprenez simplement comment vous focaliser de plus en plus sur le développement d’une sensation de respiration confortable, jusqu’au point où elle devient réellement absorbante. Cela rassemblera tous les facteurs du premier jhāna. Vous n’êtes pas obligé de penser aux facteurs individuels des jhāna. Focalisez simplement plus votre attention sur la respiration de la manière que j’ai mentionnée, et les facteurs se rassembleront. Je sais que quelques enseignants ont tendance à dire que vous devez d’abord créer la pensée dirigée et l’évaluation, et ensuite ajouter les autres facteurs, et essayer de les mélanger ensemble, de la même manière que vous suivez une recette. Mais cela disperse l’esprit. Un enseignant que je connais en Thaïlande a fait un jour cette comparaison. Si vous essayez de pratiquer les jhāna de façon livresque, rassemblant tous les facteurs séparés comme ça, c’est comme si vous aviez une mangue qui n’est pas mûre sur un arbre. Un ami passe et vous dit qu’une mangue mûre est jaune et molle, mais votre mangue, qui n’est pas mûre, est verte et dure. Donc, pour satisfaire la description de « mûr », vous la pressez et vous la peignez en jaune, mais cela ne la rend pas mûre pour autant. Vous vous retrouvez simplement avec un gâchis. Votre mangue est gâchée. La manière correcte de pratiquer consiste à arroser les racines de l’arbre, et la mangue mûrira toute seule. Quand vous vous focalisez sur la respiration, vous arrosez les racines.
Quant aux utilisations des jhāna, elles sont nombreuses.
Au minimum, cela vous aide à supporter des circonstances difficiles. Quand les choses sont inconfortables, vous pouvez cependant trouver un sens de confort à l’intérieur. Quand vous êtes tenté par des plaisirs sensuels malhabiles, vous pouvez à la place nourrir l’esprit avec les plaisirs des jhāna. L’utilisation la plus profonde des jhāna est que cela fournit la fondation idéale pour la vision pénétrante. Nous parlerons de ceci dans un prochain enseignement.
Question : pendant la méditation, je ressens quelquefois une oppression au niveau du coeur. Est-ce dû à la fatigue ou aux énergies ou à autre chose ? Que dois-je faire ? Merci. Réponse : cela peut être dû à différents facteurs. Certains d’entre eux peuvent être émotionnels, certains peuvent être dus à l’énergie dans le corps, et certains à la manière dont vous inspirez et expirez. Si vous trouvez un sens d’oppression qui apparaît au cours de la méditation, votre première approche va être de changer la manière dont vous respirez. Si l’oppression est encore là, essayez de la laisser se répandre et se dissiper dans les bras, et s’écouler et sortir par la paume de vos mains. Si cela ne marche pas, posez-vous à nouveau la question, et je vous indiquerai quelques autres manières de la traiter.
Question : quand je pense à l’univers et que j’essaie d’envoyer mettā dans toutes les directions, j’ai ces types de problèmes : 1) je reste bloqué sur le mot dans la tête au lieu de percevoir l’univers ; 2) j’ai du mal avec les directions derrière et latérales. Pouvez-vous me donner votre avis et des techniques habiles pour progresser ? Réponse : le premier problème n’est pas réellement un problème. Cela prend un certain temps pour s’habituer à l’idée du bonheur véritable. Quand l’esprit se sent confortable avec cette idée, vous pouvez penser à des personnes particulières vers qui vous voudriez le répandre. Et ensuite, augmentez graduellement le nombre de personnes que vous pouvez imaginer. Quant à la difficulté à répandre les pensées derrière vous et sur les côtés, je ne veux pas être facétieux, mais vous pouvez vous tourner vers votre droite et répandre des pensées devant vous dans cette direction, et ensuite tourner à 90 degrés, répandre des pensées devant vous dans cette direction, et ensuite continuer à tourner comme cela jusqu’à ce que vous en ayez assez. L’esprit découvrira alors qu’il peut répandre la bienveillance dans toutes les directions. Il y a des textes qui décrivent des personnes qui font vraiment cela, faisant face à différentes directions et répandant des pensées de bienveillance devant elles. Un livre parle d’un ermite qui répandait des pensées de bienveillance dans toutes les directions. Un jour, il faisait face à une direction, et le jour suivant à une autre direction. Il faisait cela jusqu’à ce qu’il ait fait face aux huit directions. Puis, il s’asseyait au centre et répandait des pensées de bienveillance, en même temps qu’une bonne énergie respiratoire, dans toutes les directions en même temps.
Question : vous nous avez dit que nous avions la liberté du choix. Mais comme tous les phénomènes du saṁsāra sont conditionnés, mon choix lui-même est conditionné. Où se situe la liberté ? Y aurait-il en nous une parcelle de non conditionné qui nous donnerait cette liberté ? Réponse : il s’agit là d’une des principales énigmes des enseignements du Bouddha. Le Bouddha dit bien que les choses apparaissent en dépendance de conditions, mais que tout n’est pas conditionné par le passé. Ainsi que je l’ai dit l’autre soir, si vous voulez trouver la liberté, le meilleur endroit où regarder se trouve dans votre potentiel de liberté de choix dans le 69 moment présent. Cette liberté de choix n’est pas vraiment inconditionnée, mais pour trouver l’Inconditionné, vous le recherchez en explorant et en maîtrisant les événements mentaux qui se produisent à proximité de votre liberté de choix : les choses comme l’attention, l’intention, la perception, et la sensation. Les enseignements du Bouddha sont intéressants en ce que les termes de base ne sont pas définis. Le mot pour le plaisir est l’un d’entre eux. Le seul mot pali sukha peut signifier plaisir, aise, bien-être, félicité. Il recouvre un vaste éventail de significations. Dans chaque cas, c’est quelque chose de désirable. C’est tout ce que le Bouddha en dit. Mais ce qu’il vous dit, c’est que l’acte de poursuivre des types particuliers de sukha donnent des résultats particuliers. Et il vous dit de rechercher un plaisir qui n’a pas de mauvais résultats. Mais le plaisir ultime est un plaisir qui ne dépend pas de conditions. Tous ceux qui l’ont trouvé sont d’accord pour dire que le plaisir ordinaire ne peut lui être comparé. Le Bouddha enseigne que la joie la plus fiable dans la vie est la joie qui peut venir de l’intérieur. La joie qui provient d’être avec d’autres personnes est une forme d’alimentation. Et comme dans chaque forme d’alimentation, il y aura une forme de stress et de souffrance, à la fois pour la personne qui se nourrit et pour la personne de laquelle on se nourrit. Pour le Bouddha, la forme idéale de joie est une forme que vous pouvez créer à l’intérieur. Quand l’esprit ne se chargera plus de fardeaux, il s’ouvrira naturellement, et alors vous serez heureux d’aider les autres de différentes façons. Cela, c’est une forme de joie qui n’implique pas le fait de se nourrir. C’est un don entièrement pur.
Question : le sens de la gratitude peut-il se développer de lui-même dans notre esprit ? Ou bien doit-il être cultivé à travers l’éducation familiale et/ou l’école ? Aujourd’hui, les jeunes ont tendance à penser qu’ils ne doivent rien à leurs parents qui leur ont donné naissance ; les enfants n’ont pas demandé à naître. Que pensez-vous de cette attitude ? Merci. Réponse : les enfants qui sont comme ça disent : « Je n’ai pas demandé à naître. » Mais selon les enseignements du Bouddha, la raison pour laquelle vous êtes né, c’est parce que vous vouliez naître. Personne ne peut forcer quelqu’un d’autre à naître. La gratitude peut parfois apparaître naturellement, mais souvent c’est quelque chose qui doit être cultivé. Il y a un problème, en particulier aux États-Unis d’Amérique, où les gens considèrent que tout leur est dû. Vous voyez cela dans la politique américaine. Tout le monde veut des services sociaux, mais personne ne veut payer d’impôts. Cela vient dans une large mesure d’un manque de gratitude. Et sans la gratitude, la société s’effondre. En conséquence, il est nécessaire d’entraîner les gens à la gratitude. Quand le Bouddha enseigne à propos du kamma, il commence avec deux sujets : la générosité et la gratitude. Il commence avec ces sujets parce que tous deux impliquent la liberté de choix. La générosité a de la valeur parce qu’elle provient du fait que nous sommes libres de donner ou de ne pas donner. La gratitude est une émotion appropriée parce que les gens qui nous ont aidés avaient le choix de nous aider ou de ne pas nous aider. Donc, nous apprécions le fait qu’ils ont choisi de nous aider. Donc, ces deux vertus : la générosité et la gratitude, sont fondamentales dans les enseignements du Bouddha sur le kamma. Et elles sont essentielles à la pratique.
Question : pourriez-vous nous dire quelques mots d’explication à propos de la méditation sur les cinq éléments ? Merci. Réponse : en fait, dans le bouddhisme, il y a six éléments : le vent, le feu, l’eau, la terre, l’espace, et la conscience. Quand nous commençons, nous commençons avec l’élément vent, en d’autres termes, la respiration. Maintenant, il est possible de combiner la respiration avec les autres éléments. Mais la manière dont Ajaan Fuang l’enseignait, c’était d’attendre jusqu’à ce que l’inspiration et l’expiration (vent) soient calmes, et ensuite de se focaliser sur les autres éléments un par un, parce qu’ils sont plus faciles à voir quand la respiration est calme. Donc, il voulait que d’abord vous vous focalisiez sur la respiration jusqu’à ce qu’en fait elle s’arrête, vous laissant avec un sens d’énergie respiratoire au repos dans le corps. Ensuite, il voulait que vous vous focalisiez sur l’élément feu. Maintenant, ces éléments ne sont pas des éléments chimiques. Ce sont plus des propriétés ou des potentiels. Donc, pour le potentiel feu, Ajaan Fuang voulait que vous vous focalisiez sur tout point dans le corps qui semblait être plus chaud que d’autres endroits. Et de la même manière que vous permettriez à l’énergie respiratoire de se répandre à travers le corps, qu’ensuite vous pensiez à ce sens de chaleur comme se répandant à travers le corps. De la même manière, avec l’eau, il voulait que vous vous focalisiez sur les points les plus frais dans le corps, et qu’ensuite vous répandiez cette fraîcheur à travers le corps. Cette habileté était particulièrement utile dans un endroit très chaud comme la Thaïlande. En ce qui concerne la terre, il voulait que vous vous focalisiez sur les parties qui ont un ressenti de lourdeur ou de fermeté, et qu’ensuite, vous pensiez à ce sens de fermeté comme se répandant à travers le corps tout entier. Ensuite, il voulait que vous mélangiez tous les éléments ensemble jusqu’à ce qu’ils soient juste à point. En d’autres termes, essayez de trouver un point d’équilibre entre l’eau et le feu, et entre la terre et le vent. Une fois que ces éléments ont atteint un état d’équilibre, et que tout est très au repos, votre sens de la forme du corps commence à disparaître. Il n’y a pas de limites claires qui entourent le corps, et votre sens du corps semble se composer d’un nuage de points de sensations, comme les gouttelettes d’une fine bruine dans l’air. Ensuite, vous vous focalisez sur l’espace entre ces points. Lorsque vous faites cela, vous vous rendez compte que cet espace imprègne le corps, entre les atomes, et qu’il s’étend au-delà du corps tout autour de vous. En ce qui concerne la conscience, après que vous avez été capable de demeurer de façon stable avec l’espace, vous vous posez ensuite la question de qui est conscient de l’espace. Vous abandonnez la perception de l’espace, et vous restez seulement avec la perception de « connaître, connaître, connaître » ou de « être conscient, être conscient, être conscient » avec un fort sens d’unité dans ce « connaître ». Voilà comment il enseignait la méditation sur les éléments.
Quand vous avez maîtrisé cela, vous pouvez équilibrer les éléments dans votre corps. Quand vous sentez que vous avez trop froid à l’extérieur, vous pouvez vous focaliser sur la chaleur. Si vous vous sentez léger dans votre tête ou que vous avez la tête qui tourne, vous pouvez vous focaliser sur la terre. Si vous vous sentez déprimé, vous pouvez vous focaliser sur la respiration pour vous donner de l’énergie. J’ai aussi trouvé qu’il est utile, quand je ressens un désir incontrôlable de rire dans des lieux où il n’est pas approprié de rire, de me focaliser sur l’élément terre dans l’estomac, et de conserver les muscles de l’estomac bien fermes. Travailler de cette manière avec les éléments vous fournit aussi une expérience directe et pratique de la force de la perception : plus vous vous attachez fermement à la perception d’un élément particulier, plus vous pouvez en faire clairement l’expérience…
Courtesy : Geoffrey DeGraff – (extrait de) l’Entraînement du comité